• • 2011 • Témoignage d'une Adolescente Joy et sa Marraine, son Parrainage, sa vie sur la Réserve !


    • 2016 •

    • JUILLET •

     
     

    Entretien avec une Adolescente de Pine Ridge !
    D'après un Article tiré du Site de ONE SPIRIT, notre Partenaire.

     

    Nous avons demandé à une adolescente de parler avec nous pour nous dire ce que c’est que de vivre sur la Réserve.

    Quand nous avons rencontré Joy, elle avait 15 ans et vivait avec une Tante qui nous a demandé si on ne pouvait pas lui trouver un Parrain. Au cours des 4 années qui ont suivi, Joy a arrêté l’école deux fois, a été hébergée par différents membres de sa famille, a utilisé des substances illicites, et a comparu devant un Juge des Enfants. En dépit de tous ces événements, elle est restée en contact avec sa Marraine.

    C’est l’histoire de son Parrainage, et de sa vie sur la Réserve, racontée par Joy et sa Marraine. Joy a 19 ans maintenant et prépare son Diplôme d’Education Générale (GED - équivalence BAC aux USA). Elle espère devenir Cosmétologue !`

     

    Entretien avec Joy,

    Q. Comment est-ce d'être adolescent sur la Réserve ?

    R. Pour certains c'est bien. Pour la plupart c'est la galère.

    Q. Peux-tu nous en dire plus sur les jeunes d'ici ?

    R. Les enfants sont vraiment doués en Art et en Musique. Ils aiment les groupes traditionnels avec les tambours. Ils vont aux Pow-Wows. Beaucoup d'entre eux sont des danseurs traditionnels, danse "fancy" - danse avec le châle - et danse en "jingle dress" (jingle : petits cônes en métal cousus sur la robe). Ils aiment aussi beaucoup le sport, mais il n'y a pas beaucoup de possibilités pour en faire.

    Q. J'en reviens à ma question du début : comment est-ce d'être adolescent sur la Réserve ?

    R. C'est dur. Il y a pas mal de gangs, et beaucoup de violence. On vous propose de la drogue, souvent de la "coke". Il y a beaucoup de drogues sur la Réserve.

    Q. J'ai entendu dire qu'il y a des jeunes qui lâchent prise et font des tentatives de suicide.

    R. Eh bien certains le font juste pour attirer l'attention de leurs parents. Ils ne les voient pas souvent. Moi même je n'ai vécu que 5 ans avec ma mère. Ma soeur a essayé de se suicider, et à la suite de ça elle a été internée dans un Hôpital Psychiatrique. Maintenant elle vient juste de sortir de prison, et elle a repris ses mauvaises habitudes : elle se drogue et elle boit.

    Q. Est-ce que tu as des amis qui ont réussi à se suicider ?

    R. Oui.

    Q. Que penses-tu des traditions Lakota ?

    R. Je suis traditionnelle. Je participe aux "huttes à sudation", à certaines Danses, et à d'autres Cérémonies.

    Q. Est-ce que les jeunes parlent Lakota ?

    R. La plupart le comprennent, mais ne le parlent pas.

    Q. Que pensent les enfants du futur ?

    R. Ils pensent que leur seul espoir est de partir de la Réserve. Mais c'est aussi dur de réussir en dehors de la Réserve. J'ai vécu en dehors de la Réserve, mais je suis toujours revenue.

    Q. Joy, comment décrirais-tu ta Marraine ?

    R. Clare est une amie. C'est facile de lui parler, et elle est toujours là.

    Q. Au début qu'as-tu pensé quand tu l'as eu comme Marraine ?

    R. Pas grand chose au début. Mais elle s'est accrochée, et appelait au téléphone. Alors j'ai appris à la connaître.

    Q. Quel est l'avantage d'avoir une Marraine ?

    R. Elle m'a aidée pour les Fêtes de fin d'année à l'école pour acheter les photos, et puis dans les moments difficiles.

    Q. Est-ce qu'elle t'as acheté des vêtements chers ou des cadeaux ?

    R. Non. Elle m'a appris à trouver les bonnes affaires en ligne et dans les magasins. On dit toujours que "seuls les idiots paient le prix fort".

    Q. Comment gardais-tu le contact avec elle ?

    R. Comme je déménageais souvent, j'utilisais un mobile pour appeler Clare. La plupart du temps on s'envoyait des SMS. Quand je pouvais trouver un ordinateur, je lui envoyais des e-mails. Je pouvais aussi l'appeler et elle me rappelait aussitôt.

    Q. As-tu jamais rencontré Clare ?

    R. Non. J'ai des photos d'elle.

    Q. As-tu perdu contact avec elle ?

    R. Non. Parfois, je n'avais pas de nouvelle pendant un mois. Mais je n'ai jamais perdu le contact.

    Q. En plus de Clare, avec qui d'autre as-tu des relations suivies ?

    R. Seulement mon Cousin. Il a mon âge. Je suis aussi en contact avec ma Tante.

    Q. Que pensent les adolescents de la Réserve à propos des Parrains ?

    R. Quelques-uns pensent qu'ils sont trop grands pour avoir un Parrain.

    Q. Que dirais-tu à un jeune sur le fait d'avoir un Parrain ?

    R. Que c'est une grande aide. Qu'ils sont toujours là quand on a besoin d'eux.

     

    Entretien avec la Marraine de Joy,

    Le point de vue de Clare sur son expérience de Parrainage d'un adolescent de la Réserve de Pine Ridge :

    Je ne sais pas trop quoi dire sur ma relation avec Joy. De plus, je trouve qu'il est plus facile d'en parler que d'écrire à ce sujet.

    Quand j'ai commencé à la parrainer, il s'est passé 7 semaines avant que je ne reçoive des nouvelles d'elle. Ensuite, j'ai reçu un e-mail où elle me donnait ses mensurations. Pendant des mois la communication a été sporadique jusqu'à ce qu'elle vive de façon stable avec une Tante. Quand elle a eu un numéro de téléphone fixe, j'ai pu appeler plus souvent pour avoir des nouvelles. Parfois, je devais appeler de la famille ou envoyer des messages en espérant qu'elle regarde ses mails.

    Au début j'envoyais des vêtements et des fournitures scolaires, du maquillage, des trucs pour les cheveux, des livres, des manteaux. Les bals de l'école ont toujours été importants pour Joy. Je l'ai aidé pour les bals de promos. Ensemble, nous avons appris à trouver les bonnes affaires sur internet et dans les magasins de proximité. Maintenant on dit : "Seuls les idiots paient le prix fort !".

    Joy aime soigner ses cheveux. Donc deux fois par an je lui paie un bon coiffeur pour qu'elle puisse faire ce qui lui plait : coupe, couleur, etc.

    Quand elle a des problèmes, j'écoute et je ne juge pas. Qui sait comment j'aurais réagi à son âge, compte tenu de la situation et de l'environnement dans lequel elle vit ? Cependant je lui ai bien dit que je ne paierai pas de caution ou que je n'irai pas visiter quelqu'un en prison. Ce n'est pas tout à fait vrai... Il est vrai que je n'ai pas encore eu à faire face à cette situation.

    Toutes ces années, on a parlé des bébés. Il y a tellement de filles de son âge qui ont déjà un ou deux enfants. Joy adore les enfants et se voit bien maman, mais elle préfère attendre jusqu'à ce qu'elle soit capable d'assumer financièrement ses enfants. Elle veut aussi profiter de sa jeunesse.

    On parle aussi des choix que l'on fait dans la vie. Qu'ils soient bons ou mauvais, il faut être conscient que quelque soit le choix qui est fait maintenant il limitera ce qu'on peut faire plus tard. Je lui dit qu'elle a tout le futur devant elle.

    On discute de la force qu'il faut pour se libérer d'une situation explosive et des combats qui valent la peine. Je lui demande si une bagarre (et la raison de cette bagarre) vaut la peine de passer 30 ans derrière les barreaux ?

    Je lui envoie des livres que je pense qu'elle aimera. Parfois elle les apprécie, parfois non. On parle de ses études à l'école. Elle n'aime pas l'histoire. Alors j'essaie de trouver des moyens de lui faire aimer le sujet.

    Avoir un bon sens de l'humour est très important. Être capable de rire ensemble est un merveilleux moyen de discuter de sujets peu familiers. Être honnête, c'est également très important. Si je ne pouvais faire plus, je le dirais à Joy. De cette façon, elle aurait la possibilité de demander ce dont elle a besoin à d'autres.

    Parfois, nous ne sommes pas d'accord sur certains sujets. Et ce n'est pas un problème. On n'a pas besoin d'avoir les mêmes points de vue pour être amies. Je pense qu'il est important que je reconnaisse qu'il y a des choses que je ne sais pas. Les adolescents se rendent compte très vite quand on leur raconte des bobards. Alors je dis à Joy que je ne sais pas ou que je n'ai pas la solution, mais que peut-être on peut trouver ensemble.

    Je ne sais pas trop quoi dire de plus. J'ai du mal pour définir l'émotion. Je sais que je tiens à cette jeune fille. Souvent, quand je vais me coucher je pense à elle et je me fais du souci car elle côtoie des ivrognes et des gens qui se bagarrent.

    J'ai peur qu'elle ait un accident de voiture. Je lui dit que la ceinture de sécurité est importante.

    Je me fais du souci... Et si elle tombait enceinte... Et si elle avait le coeur brisé...

    Ce que je fais surtout, c'est lui dire combien elle est formidable. Qu'elle peut tout faire si elle le veut vraiment. Qu'elle a plein de possibilités. Que je suis fière d'elle quand elle fait quelque chose de bien ou quelque chose de gentil pour quelqu'un d'autre. Les enfants n'ont jamais assez d'encouragements. Maintenant quand je lui dis qu'elle est formidable, elle me dit "Ouais, je sais !". Mais je sais qu'elle aime encore l'entendre. Parfois c'est dur, mais c'est important de lui dire que je suis fière même si c'est pour quelque chose d'insignifiant.

    On ne parle pas toujours de sa vie. Parfois on parle de ce qui arrive dans ma vie, de ma famille, etc. Je la traite comme une jeune adulte.

    Sans son téléphone portable, je pense que les choses auraient été différentes. On s'envoie des textos presque tous les jours. En général, je lui demande à quel numéro je peux appeler. J'essaie de payer une partie de son abonnement chaque mois. Comme cela on peut rester en contact. Elle m'envoie des SMS pour me dire qu'elle va bien. Parfois elle est triste et nos conversations durent des heures.

    Il y a des différences culturelles. Je me suis rendue compte que j'avais besoin de savoir pas mal de choses sur sa Culture pour comprendre ce qui est important pour elle. J'écoute quand elle me parle de sa Culture et m'explique certains points particuliers. Et je lui pose des questions. Mais jamais je n'ai mis en cause les "pourquoi" et jamais je ne la questionne sur les implications de tout cela. Je suis mal placée pour cela. J'essaie de lui faire comprendre qu'elle doit être fière de sa Culture et que c'est une partie importante de son identité.

    Cela marche parce que nous nous soucions l'une de l'autre. Je fais de mon mieux pour comprendre. Je me rappelle que j'ai été adolescente et de ce sentiment d'être perdue dans ce monde. Cela marche parce que dès le début je me suis fait le serment qu'elle aurait à me supporter les 40 ans qui viennent !

    Joy était une ado sympa, et un challenge. Et maintenant c'est une jeune femme étonnante. Bien qu'elle m'ait fait stresser un maximum, je ne peux imaginer de meilleure relation. Je suis tellement fière d'elle. C'était difficile la première année.

    Elle ne comprenait pas pourquoi je voulais être sa Marraine. Elle a dû se faire violence pour me faire confiance. 

    Si j'examine la situation de son côté, elle n'avait aucune bonne raison pour me faire confiance : une femme bizarre qui m'envoie des trucs sans bonne raison ?

    Quand elle m'a demandé pourquoi je voulais être sa Marraine, je n'ai pas réussi à donner une bonne réponse. Je ne savais pas pourquoi en dehors du fait que je voulais l'aider.

    Ensuite quand je l'ai mieux connu je suis devenue encore plus déterminée à être là pour elle de quelque façon que ce soit.

     

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